La-perche-a-selfie-un-risque-pour-la-vie

Un Français sur 10 a déjà utilisé une perche à selfie


Ton amie journaliste a fait un effort de concentration lorsqu'on lui a présenté les résultats d'un sondage Ipsos Photobox (je suis sympa je les cite) sur notre rapport à la photo. Ils ont été hyper malins, les viennoiseries étaient dans une autre pièce.

Sache, ami lecteur que :

> Deux Français sur trois prennent au moins une photo par jour > 64% ont déjà photographié un plat > Un Français sur deux a déjà pris un selfie, et un sur dix a déjà utilisé une perche à selfie > Un quart des Français reconnait une forme d'addiction aux photos > 8% des Français sont prêts à se mettre en danger pour prendre une photo

Les pains au chocolat eussent-ils été à portée de main, ces révélations consternantes auraient peut-être coupé l'appétit de ton amie journaliste. (Peut-être).

Heureusement, il y avait dans la salle une sémiologue très intéressante, Laurence Allard, avec qui j'ai entamé une conversation qui a failli tourner à la psychanalyse. J'ai raconté que pour faire partie de ce monde, j'avais moi-même pris en photo un burger et mis mon œuvre sur Instagram. Et qu'immédiatement après, j'avais été terrassée par un immense coup de blues. Elle a dit "Tiens, mais pourquoi ?", j'ai dit "Je sais pas, je me suis sentie tellement con".

Puis elle a expliqué de manière assez convaincante pourquoi ce n'était peut-être pas si pathétique de mettre sa vie en scène en prenant des photos toute la journée. "Ce n'est pas forcément du narcissisme", affirme Laurence. D'abord parce que la photo est comme une nouvelle page blanche où se raconter -avec certes plus ou moins de talent et de créativité-.

Ensuite parce qu'elle permet de transfigurer des moments banals, ou ennuyeux, et de se sentir moins isolés en les partageant.

Et enfin parce que nous sommes des êtres libres et inquiets, dénués de projet collectif et angoissés par les conditions socio-économiques. Documenter le quotidien pourrait être une façon de "remédier aux incertitudes identitaires". La photo fonctionnerait comme un miroir, une assurance que nous existons bel et bien. A défaut d'autre chose, le fil Instagram assure la continuité de l'identité. Pour donner un sens au merdier, certains ont le Djihad, nous on a la perche à selfie. Bon. Ça fait moins de morts.



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