Tic de langage à la con, suite
Suite de l'examen de nos tics de langage. Aujourd'hui : "pas de souci".
Conséquence d'une année 2015 généreuse en abominations, nous souhaiterions qu'on nous foute la paix, si c'était possible. Résolution pour l'avenir : éviter la baston.
Est-ce pour cette raison que nous répétons « pas de souci » à longueur de journée ?
Quand vous êtes d'accord pour décaler une réunion (« pas de souci »), quand vous n'éprouvez pas de rancune pour celui qui vient de vous briser le métatarse (« pas de souci »), ou quand quelqu'un vous demande si vous êtes libre pour dîner (« pas de souci »).
« Pas de souci » a terrassé « pas de problème », « d'accord », et même « oui ». Près de vingt ans après la sortie de l'album No Soucy d'Ophélie Winter (visionnaire), les trois mots règnent en maître dans nos conversations.
Tel un animal qui présente sa gorge à son adversaire pour signifier qu'il abandonne le combat, nous brandissons « pas de souci » comme un drapeau blanc, pour neutraliser toute agressivité potentielle.
Pour l'instant, la formule incantatoire n'est pas follement efficace, mais elle ne mange pas de pain. Tout juste soulève-t-elle quelques interrogations orthographiques lorsqu'il s'agit de déterminer s'il faut mettre un s final au « souci » de « pas de souci » - (la réponse est non, ami lecteur).
(Texte parus dans Marianne #975)