Semaine parano avec Citizenfour
Ton amie journaliste a vu Citizenfour, de Laura Poitras
Semaine parano pour ton amie journaliste. Lundi : L'Enquête, film de Vincent Garenq sorti le 11 février, qui raconte le calvaire du journaliste Denis Robert lorsqu’il a dévoilé ce qu’on a appelé « l’affaire Clearstream ». Ou comment un enquêteur se retrouve avec une soixantaine de procédures judiciaires au cul pour avoir éclairé le monde sur les us et coutumes de multinationales pas convaincues par le principe de l’impôt. Clearstream existe toujours, ils ont un beau site Internet que l’on peut consulter pour se rassurer sur le fait que le scandale n’a servi à rien. On se sent bien bien bien après ça ! #régal.
Mercredi, c’est le documentaire de Laura Poitras sur Edward Snowden qui est venu achever ce qui pouvait nous rester de confiance en la démocratie. Cloitré dans une chambre d’hôtel à Hong-Kong, absolument conscient des risques (emprisonnement, assassinat) qui le guettent, Snowden décrypte avec la patience d’un maitre d’école les systèmes mis en place par la NSA pour espionner les citoyens. Trois journalistes l’écoutent, se préparant à livrer le scoop de leur vie. Laura Poitras filme sobrement un homme de 29 ans qui a pris la décision de sacrifier sa liberté de mouvement au nom de la vérité. C’est, comme qui dirait, un peu poignant.
Snowden a beau être un génie de l’informatique, il en est réduit à mettre une couverture sur la tête quand il tape sur son clavier. Au cas où une caméra dissimulée espionnerait ses gestes. Quand il doit échanger des infos cruciales avec Glenn Greenwald, le premier journaliste qui relayera ses déclarations, c’est en griffonnant sur des petits papiers que les deux hommes communiquent. Les papiers peuvent être déchirés pour ne plus laisser de trace… Tout autre outil de communication « moderne » est un mouchard potentiel. Dans ce film, on apprend que pour discuter sans risque, le mieux est encore de se rencontrer en face à face, dans le sous-sol d’un parking. An de grâce 2015 ? C'est bien cela, 2015.
A la fin, on se dit deux choses : que l’on a été bien naïf de croire à la notion de progrès, et que le salut vient de l’obstination calme de ceux qui savent rester fidèle à leur éthique. A une époque, on les appelait les Justes, aujourd’hui, on parle de lanceurs d’alerte.
Si ça t'intéresse ami lecteur, j’en ai parlé dans Marianne ici.