Les hippies 2.0
En Californie, ton amie journaliste a découvert une espèce dont elle ignorait jusqu’à présent l’existence : les hippies 2.0. J’ai même vécu une semaine dans une maison que dix d’entre eux partagent à Oakland, en banlieue de San Francisco.
A première vue, ils présentent les caractéristiques des baba cools : anticapitalistes, au taquet contre les discriminations raciales et sexistes. Et bien entendu, opposés à toute forme d’épilation féminine (ton amie journaliste à deux doigts d'élaborer une théorie selon laquelle l'activisme a un effet booster sur la pilosité).
Sauf que ce sont aussi des génies de l’informatique. Ils ont été formés dans les meilleures universités états-uniennes avant de dire fuck off à la société de consommation. Et ils n’ont pas fait semblant de dire fuck off, ami lecteur.
Ils récupèrent et réparent tout, du bric à brac insensé qui meuble leur baraque à ce qu’ils portent sur le dos. Ils mangent les légumes qu’ils cultivent et les œufs que leurs donnent leurs volubiles canards (note pour plus tard : enquêter sur ces bestioles imbéciles qui caquettent en pleine nuit pour des raisons mystérieuses).
Les hippies 2.0 se disent « hackers ». C'est à dire qu'ils bidouillent tout, du world wide web à un jacuzzi récupéré dans la rue (cf. la passion des californiens pour les bains chauds évoquée la dernière fois). Certains d’entre eux réalisent de temps en temps des missions temporaires pour des boites de la Silicon Valley ; avec ce qu’ils gagnent, ils vivent pendant des mois, et se concentrent sur l’essentiel : changer le monde.
A Oakland, leur utopie s’incarne dans un lieu appelé Omni Commons. Va donc regarder leur vidéo de présentation ami lecteur, je pense que ça peut t’en boucher un coin.
Durant ces huit jours, ton amie journaliste a dû dépenser vingt dollars ; je n’étais plus une « consommatrice ». Et ça fait une différence énorme. Ça ne m’a pas manqué sur le moment, bien au contraire. Ne plus se servir de son portefeuille pour être en lien avec le monde procure un sentiment de liberté et d'autonomie galvanisant.
Mais avec le recul, je crois que mon pétage de câbles au rayon cosmétiques du duty free, avant de prendre mon avion de retour, était une sorte de réflexe de défense pavlovien de mon cerveau malade.
En ce qui me concerne, la rééducation risque de nécessiter un second séjour chez les purs...